La chambre de mon adolescent est en permanence en désordre ! Etre ou ne pas être exaspéré(e) ?!
Vous connaissez la situation par cœur. La preuve en image !
Alors que votre idéal c’est ça:

LOL.
MDR.
Bon, soyons sérieux un instant.
Commençons par quelques définitions du mot « ordre ».
Tout d’abord : ordre: du latin ordo, « rang », « rangée » « conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples » (Descartes), disposition qui semble la meilleure possible. Effectivement, on comprend que l’ordre extérieur reflète l’ordre intérieur. Et par conséquent, qu’une chambre d’adolescent mal rangée (doux euphémisme…) est synonyme pour le parent d’un désordre intérieur alarmant.
Poursuivons notre exploration sémantique : « qualité d’une personne qui range les objets à leur place et sait les retrouver » « qui a une bonne organisation, de la méthode » : et oui, l’ordre est une QUALITE ! Personne ne peut en douter n’est-ce pas ? Attendons un peu et continuons.
«Là tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté » Baudelaire : qui ne connaît pas ce vers célèbre qui conjugue avec talent et poésie l’ordre à un sentiment de paradis sur Terre ?
Un peu plus loin dans notre dictionnaire : « principe de causalité ou de finalité du monde : « un ordre réglé de tout temps par la Providence » La Rochefoucauld. Ah, alors si l’ordre régit également le monde, alerte générale devant l’état de la chambre de notre adolescent ! Un tel désordre prend des dimensions cosmiques !
Terminons avec le bouquet final : « ordre public : sécurité publique, stabilité sociale, respect de la société établie »
« un ordre : acte par lequel une autorité manifeste sa volonté »
« ordre religieux, groupe de personnes soumises à certaines règles ».
C’est beaucoup moins sexy, non ? Vu comme ça, l’ordre en devient contraignant, rebutant, voire exécrable cat il est synonyme de privation de liberté.
Or notre adolescent est précisément en recherche de liberté. Car il étouffe. Dans son corps, dans sa tête, dans tout son être. En quête d’une autre identité que celle de votre « petit enfant chéri », plus dans le monde douillet et rassurant de l’enfance mais pas encore dans celui prometteur de l’âge adulte, il doit se construire ses repère à lui. Et justement, c’est dans son « repère » (comprenez, sa chambre) qu’il va opérer cette transformation, cette métamorphose.
Dolto comparait l’adolescent à un homard sans carapace : vulnérable, forcé de se cacher en attendant que le changement de forme soit accompli.
En proie à des bouleversement physiologiques et psychologiques profonds, l’adolescent étouffe dans son ancien corps d’enfant et doit attendre que son nouveau corps d’adulte soit enfin achevé. Sa chambre est le lieu privilégié où il peut réapprendre à se connaître lui-même pour définir de nouveaux repères avec les autres.
On peut comprendre que ranger sa chambre n’est donc pas une priorité et même que c’est la dernière chose qu’il souhaite.
Problème : quand l’adolescent referme la porte de sa chambre derrière lui, le parent se sent exclu, rejeté par l’enfant qu’il a chéri durant une douzaine d’années. Et devant le désordre (ou capharnaüm, chaos, déballage, fatras, fouillis, pagaille, bazar, binz, chantier, fourbi, souk, bordel, boxon, foutoir, merdier…), se rappelle à lui la pression sociale de l’ordre comme « bon comportement ».
Or, selon Tim Harford, écrivain et économiste britannique, le désordre favorise la créativité ! Et oui, selon une étude datant de 2013 de l’université du Minnesota, il permet la naissance de pensées innovantes et non-conventionnelles.
Je vous suggère aussi « De la joie d’être bordélique » par JenniferMcCartney (2016) : tout est dans le titre !
Bref, une fois que l’on a dit tout ça, que faire ? Quand s’inquiéter ?
On s’inquiète quand l’adolescent s’isole, qu’il n’a plus aucune vie sociale ou qu’il devient un maniaque du rangement.
Et on peut rappeler les règles de la maisonnée : il y a une différence entre un désordre dans son espace personnel (chambre) et celui que l’on se permet dans l‘espace collectif (salon, cuisine, salle de bain…).
Pas de panique : une fois dans son propre studio, notre adolescent saura gérer. Et de tout façon, cela ne nous concernera plus !
Bon, et pour terminer, rigolons un peu : et vous, comment était votre chambre quand vous aviez 14 ans ?
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